La BEAC a mis officiellement en circulation sa nouvelle gamme de billet depuis le 15 décembre 2022. Ces nouvelles coupures moins larges que les précédentes sont sujets à des sentiments controversés de la part des utilisateurs camerounais. Si d’aucuns s’accorde pour dire qu’ils sont plus beaux sans manquer de noter la ressemble à l’euro, une autre partie interroge la pertinence de cette initiative.
La nouvelle gamme de billets est mise en circulation alors que la banque centrale célèbre son cinquantenaire. Elle marque l’introduction d’une ère nouvelle pour l’institution qui compte au fur et à mesure stabiliser le secteur financier de la sous-région.
L’esthétique du Nouveau Franc CFA
Cette nouvelle gamme de billet a des caractéristiques qui la distingue de l’ancienne. Mis à part les informations apposées sur le billet, on peut également noter que la taille des coupures sont moins grandes, ce qui facilite le maniement. On peut également remarquer que ces informations posées mettent en évidence les problématiques actuelles de la sous-région. Par exemple, la coupure de 5000 FCFA met en avant la faune qui est menacé par le phénomène de braconnage et de chasse illégale, ceci portant atteinte à la biodiversité.
La coupure de 10 000 FCFA met en avant l’éducation. Serait-ce un hasard que le billet le plus valeureux porte les effigiés de l’enseignement ? Peu importe la réponse car ceci rappelle le défi de la formation de la jeunesse africaine pour la contribution à son développement et à son positionnement sur la scène internationale. L’allure de ces billets ont conquis l’esprit artistique de plusieurs. En effet, Charlène Rolande, chargé de clientèle dans le secteur du tourisme fait savoir que ces billets sont « plus beaux que les précédents« . Quelques un n’ont pas manqué de faire le rapprochement entre ces billets et l’euro ce qui n’est pas particulièrement bien vu au regard de la proximité à l’euro souvent repprochée au franc CFA.
FCFA : quelles est la valeur ajoutée des nouvelles coupures ?
Face à la vague d’apologie autour des nouveaux billets en circulation, plusieurs personnes se sont indignées. Elles ne comprennent pas la valeur ajoutée de cette nouvelle gamme. Une jeune camerounaise business analyste à son propre compte se demande » comment est-il possible d’associer nouveau et FCFA dans une phrase ? » allant dans le même sens, un poste pris sur Facebook laisse lire ce qui suit : « Tiens, regarde mes chaînes, elles sont plus neuves que les tiennes. #nouveauxbillets« .
Ces différents commentaires sont assez révélateurs quant à la pertinence de la mise en circulation de la gamme 2020. Les propos de Sinthia Akamba, jeune camerounaise vivant à Douala exprime clairement le fonds de la pensée des deux précédents : « Les nouvelles coupures sur un point esthétique sont appréciables toutefois, elles n’ont aucun impact sur la valeur de la monnaie et sur l’inflation« .
Après cinquante années d’existence la population de la sous-région s’attendait certainement à mieux de la part d’une institution qui porte l’avenir financier de plusieurs pays.
Freiner les techniciens du blanchiment de capitaux et de la contrefaçon
Plutôt cette année, le GABAC avait déjà fait mention de ce que la situation du Cameroun en matière de blanchiment de capitaux était critique. Cette révélation apparait comme une sonnette d’alarme au vu des fortes sommes que font perdre ce délit et les déviances connexes. Les techniciens du blanchiment des capitaux ont pu blanchir près de 1 050 milliards de francs au Cameroun, au cours de la période de 11 ans, allant de 2006 à 2017.
Cette nouvelle gamme va imposer au détenteur d’argent noire de se tourner vers les guichets afin d’obtenir les nouvelles coupures conformément aux recommandations de la BEAC. Sachant que la règlementation impose de justifier la source des revenus, ceci constituerait une bonne mesure pour couper l’herbe sous le pied des techniciens du blanchiment et de la contrefaçon.
Le nouveau FCFA ne résout pas les problèmes structurels
Cette solution de nature conjoncturelle ne résout pas les problèmes réels du continent. En effet, du plus récent au plus ancien on peut observer que, la crise entre la Russie et l’Ukraine qui a entraîné une baisse de la valeur de l’euro, ce qui a eu des conséquences sur la valeur du FCFA. Les politiques à mettre en œuvre en matière de stabilisation des prix sont freinées à cause de la parité entre l’euro et le FCFA par le lien du trésor français.
Il est également important de noter que l’environnement actuel tant à se digitaliser. A cet effet, la monnaie fiduciaire à l’échelle internationale laisse place à la monnaie électronique et aux cryptomonnaies. En Afrique centrale, la vulgarisation du mobile money et tout récemment l’adoption du bitcoin comme monnaie nationale à côté du FCFA par la RCA, sont autant de questions qui devraient permettre à la BEAC de mettre en œuvre des mesures avant-gardistes en matière de transactions digitales.
Dans un contexte mondial de forte concurrence, la dépendance monétaire est un point stratégique en défaveur des économies de la zone Franc en général. C’est pourquoi en droite ligne avec les objectifs de développement des autres institutions financières africaines, la BEAC se doit de mettre en œuvre des politiques qui favorises l’appropriation de celle-ci d’une façon profitable à l’Afrique.
