Les femmes de Sukuta-Salagi pleurent leur marché ainsi que leurs précieuses marchandises après sa destruction par le gouvernement gambien. Fruit de la coopération entre l’association de Sukuta-Salagi, les femmes de la même zone et les autres communautés environnantes, ce marché a longtemps été ignoré par le gouvernement malgré un appel de ses initiatrices à le reconnaître et le maintenir sur le site actuel. Aujourd’hui, après ce passage sans préavis officiel, les femmes ont déclaré qu’elles poursuivront le gouvernement gambien en justice.
Malgré les nombreux appels des femmes de Sukuta-Salagi, le gouvernement a ordonné la semaine passée, la démolition du nouveau marché et d’autres structures privées dans le voisinage.
Une décision commune
Après la démolition du marché, Mme Bintou B. Colley, s’est adressée aux journalistes à qui elle a déclaré avoir pris contact avec l’association des Femmes Avocats dans le but de traduire le gouvernement en justice. La secrétaire générale de l’Association Unity de Sukuta-Salagi, a déclaré que ses consœurs et elle étaient confiantes et sans crainte « car nous avons des droits en tant que citoyennes. »
D’après les propos de Mme Colley, la destruction du marché s’est faite par le Département de la Planification Urbaine, qui n’a entrepris aucune démarche de négociation ni de notification de manière formelle, auprès des occupantes du lieu.
S’agissant de la valeur des tentes et magasins détruits au marché, elle l’a estimée à 500.000 dalasis. Elle a précisé que les commerçantes avaient procédé à l’acquisition de bois et de tôles ondulées pour installer leurs tentes. Un matériel pour lequel elles ont dû débourser la somme de 360 dalasis pour les baguettes de bois et entre 1500 et 2000 dalasis pour la rémunération des prestataires qui ont construit les tentes et étalages.
Le Département de la Planification Urbaine a également procédé à la démolition de stalles métalliques dont l’acquisition seule par les commerçantes, avait nécessité la somme de 25.000 ou 30.000 dalasis.
Témoignages des commerçantes de Sukuta-Salagi
Plusieurs commerçantes, victimes de cette démolition, se sont exprimées sur la tragédie qui les a frappées. Parmi elle, Mme Wuya Bojang, qui a confié avoir personnellement perdu une tente et du bois d’une valeur estimée à 2500 dalasis. « J’ai également déboursé la somme de 2000 dalasis pour l’acquisition de marchandises – je n’ai cependant pu procéder à la vente de ces marchandises car nos installations ont été démolies » a-t-elle ajouté.
Mme Aminata Sanneh, une vendeuse, a quant à elle affirmé avoir déboursé la somme de 27.000 dalasis pour la construction de son étalage. Elle a ensuite révélé que le gouvernement a méprisé les règles et procédures avant d’ordonner la destruction des marchés et structures privées.
À Sukuta-Salagi, le problème ne concerne pas que les femmes. Malgré leur absence lors de la démolition du marché, les hommes de la communauté qui étaient nombreux à prendre part à une série de conférences de presse concernant le nouveau marché au cours des dernières semaines, ont tenu à en expliquer la raison. D’après Mme Bojan ils avaient été informés qu’ils seraient arrêtés s’ils tentaient d’empêcher la démolition du marché.
Cependant, le gouvernement, a affirmé via son ministère des Ressources Foncières que le site en question était réservé à d’autres fins d’utilité publique, et que la faute revenait à ces femmes qui ont insisté sur le fait qu’elles avaient besoin de ce site pour la tenue de leur marché.
Une chose est certaine, les femmes de Sukuta-Salagi n’ont pas l’intention de laisser le gouvernement gambien s’en tirer. « Nous n’accepterons nullement la destruction de nos installations. Nous prendrons contact avec le Bureau des Femmes et lanceront des procédures judiciaires en vue du remboursement des sommes d’argent que nous avions déboursées. » Ont-elles déclaré.
De son côté, le Comité de Protection des Journalistes (CPJ) a demandé aux autorités gambiennes de privilégier les reformes juridiques et des poursuites en justice pour les crimes contre la presse.