Vingt-quatre ans après sa mort, le nom du dictateur Sani Abacha refait surface dans l’actualité nigériane. Cette fois, il s’agit d’un accord signé cette semaine entre les États-Unis et le pays dont il a été le président entre 1993 et 1998, concernant l’argent détourné durant cette période. Alors que les 23 millions de dollars pillés et cachés à l’étranger par l’ancien dictateur, seront rapatriés, il se pose la question de l’emploi de ces fonds dans un Nigeria qui sombre un peu plus chaque jour, dans la crise économique.
Avant d’être à la tête du Nigéria, Sani Abacha a occupé le poste de ministre de la Défense du gouvernement de la transition, instauré par son prédécesseur Ibrahim Babaginda. En novembre 1993, il se proclame chef de l’État, il supprime toutes les institutions démocratiques et remplace de nombreux fonctionnaires civils par des chefs militaires.
C’est le début d’une dictature qui va signer l’isolement politique du Nigéria à l’international. Entre tortures, arrestations illégales, meurtres et corruption, le régime d’Abacha plonge le Nigéria dans un chaos sans nom. Aujourd’hui, une vingtaine d’années après son décès, une petite portion du butin détourné par Abacha et des membres de sa famille, va être retournée au Nigéria.
Retour au pays natal
Après avoir commis leur forfait, la famille Abacha s’est assurée de cacher les millions dans des comptes étrangers, notamment en Suisse, en Grande-Bretagne et aux États-Unis. Des pays qui, ces dernières années, ont rendu d’importantes sommes d’argent au Nigeria.
En commençant par la Suisse qui avait annoncé la restitution d’une grande somme au Nigéria en 2017. Il s’agissait d’un montant de 321 millions de dollars d’actifs, qui avaient été saisis dans le cadre d’une procédure pénale contre le fils du Général Abacha.
Cette semaine, c’était au tour de l’ambassadrice des États-Unis au Nigéria d’annoncer que près de 335 millions de dollars volés par Abacha et sa famille, avaient été détournés et gardés par son pays jusqu’à présent.
Un retour risqué
Alors que le retour de la dernière tranche de cette somme, qui s’élève à 23 millions de dollars a été annoncé, de plus en plus de nigérians ont exprimé leurs craintes quant aux risques que cet argent soit détourné et englouti par la corruption, avant même qu’il ne soit arrivé dans les caisses de l’État.
Même si le but ultime de ces fonds a déjà été décidé, le Syndicat du personnel académique des universités (Asuu), a fait une autre proposition. Cela fait un peu plus de sept mois que le groupe mène une grève pour l’amélioration des conditions de vie et de travail du corps enseignant universitaire. À cet effet, il a suggéré que cette somme soit investie dans l’augmentation des salaires des professeurs d’université, plutôt que dans les projets d’infrastructures, « pour que les jeunes puissent reprendre le chemin des cours« .
Au Nigéria, la crise économique est réelle et le pays s’y enlise de plus en plus. L’argent retourné est prévu pour le financement de trois projets d’infrastructures, plus précisément un pont sur le fleuve Niger, l’autoroute Lagos Ibadan et la route Abuja-Kano. Des réalisations tout aussi bien pensées et importantes que les autres suggérées ; encore faudra-t-il que ce pactole tombe entre de bonnes mains.