Mercredi, à Kinshasa, le roi Philippe a, une nouvelle fois, fait part de ses « plus profonds regrets pour les blessures » infligées à l’ex-Congo belge durant la période colonial et a restitué un masque traditionnel à la RDC lors de sa première visite dans l’ancienne colonie, où de nombreuses personnes sont toujours en colère parce que le royaume ne s’est pas excusé pour des décennies de régime brutal.
Le souverain a remis au musée un masque géant « kakuungu« , qui était utilisé pour des rites d’initiation de l’ethnie Suku. Cet objet, a-t-il précisé, est prêté pour une durée « illimitée » au MNRDC par le Musée royal de l’Afrique centrale de Tervuren, près de Bruxelles.
Des regrets et un espoir de meilleures relations exprimés
« Je suis ici pour vous rendre cette œuvre exceptionnelle afin de permettre aux Congolais de la découvrir et de l’admirer », a déclaré le roi Belge. « Elle marque le début symbolique du renforcement de la collaboration culturelle entre la Belgique et le Congo. »
Selon certaines estimations, les massacres, la famine et les maladies ont tué jusqu’à 10 millions de Congolais pendant les 23 premières années de la domination belge, de 1885 à 1960, lorsque le roi Léopold II dirigeait l’État libre du Congo comme un fief personnel.
Le régime colonial, « basé sur l’exploitation et la domination » était « celui d’une relation inégale, en soi injustifiable, marqué par le paternalisme, les discriminations et le racisme. Il a donné lieu à des exactions et des humiliations », a déclaré solennellement le souverain dans un discours prononcé à Kinshasa, sur l’esplanade du Parlement. « À l’occasion de mon premier voyage au Congo (…), je désire réaffirmer mes plus profonds regrets pour ces blessures du passé », a-t-il ajouté
En 2020, Philippe est devenu le premier officiel belge à exprimer des regrets pour les « souffrances et les humiliations » infligées à la RDC.
Des excuses oui mais pas uniquement
Si la démarche du roi Phillipe est appréciée dans son ensemble, et a une forte portée symbolique, un grand nombre de congolais tiennent à rappeler qu’elle ne constitue en rien une réparation.
Le caporal Albert Kunyuku avait été enrôlé en 1940 et a fait partie du contingent militaire d’appui médical envoyé en Birmanie en 1945. Le vieil homme et le roi Belge ont échangé une longue poignée de main et quelques mots.
« Le roi vient de me faire des promesses. C’est très bien. Il faut les matérialiser« , a ensuite déclaré le caporal Kunyuku.
« Décorer c’est bien. Mais, il faut aussi indemniser les familles de ces anciens combattants qui ont perdu la vie dans une guerre qui ne les concernait pas », commente Madeleine Yowa, une infirmière de 43 ans. Marie-Thérèse Bakuku, 73 ans, vendeuse au marché Gambela voisin, parle même d‘ »hypocrisie » et demande elle aussi des « indemnisations conséquentes » pour leurs descendants.