La justice britannique examine des recours de dernière minute contre le projet du gouvernement d’envoyer au Rwanda des migrants arrivés illégalement au Royaume-Uni.
Mardi, un premier vol transportant une trentaine d’entre ces migrants est prévu. Il s’agit d’un vol qui survient quatre jours après l’échec d’un recours d’associations de défense des réfugiés.
Cependant les associations Care4Calais et Detention Action, faisant partie des plaignants, ont interjeté appel, qui sera entendu lundi.
Du côté des requérants, figure le syndicat de la fonction publique PCS. Ce syndicat compte dans ses rangs des agents des douanes chargés de la mise en œuvre les expulsions.
Le secrétaire général du PCS, Mark Serwotka a souligné que la Haute Cour prévoit d’examiner en détail la légalité du plan gouvernemental en juillet. Dimanche sur SkyNews, il a également déclaré : « Imaginez qu’on vous dise de faire quelque chose mardi, qui en juillet est jugé illégal. Ce serait une situation épouvantable ».
Un autre recours intenté par l’association d’aide aux réfugiés Asylum Aid doit aussi être entendu lundi par la Haute Cour.
Par cette méthode qui rappelle la politique menée par l’Australie, le gouvernement, en envoyant des demandeurs d’asile à plus de 6.000 kilomètres de Londres, compte dissuader les arrivées clandestines dans le pays, toujours plus nombreuses.
Depuis le début de l’année, ce sont plus de 10.000 migrants à bord de petites embarcations, qui ont traversé de façon illégale, la Manche afin d’atteindre les côtes britanniques. Une hausse considérable par rapport aux années précédentes, qui étaient déjà un record.
Le Premier ministre Boris Johnson, qui dit vouloir s’en prendre aux passeurs, affirme que cette stratégie contribuera « à briser le modèle commercial de ces criminels impitoyables ».
Critiques de l’ONU
Lors d’une audience tenue ce vendredi à la Haute Cour à Londres, l’ONU a vivement condamné cette stratégie.
À cet effet, Laura Dubinsky, avocate du Haut-Commissariat aux Réfugiés (HCR), a parlé de l’inquiétude de l’agence onusienne sur le risque de « préjudice grave et irréparable » porté aux migrants.
Elle a d’ailleurs accusé le gouvernement de mensonges en déclarant que : « Le HCR n’est pas impliqué dans l’arrangement entre le Royaume-Uni et le Rwanda, malgré les affirmations contraires de la ministre d’Etat ».
James Nichol, avocat et administrateur de l’association Care4Calais, a dénoncé une politique « brutale » visant « des gens qui viennent de pays déchirés par la guerre » et « sont déjà traumatisés ».
Des propos problématiques
Samedi, le quotidien The Times rapportait les propos du Prince Charles qui en privé, aurait jugé « consternant » le projet du gouvernement. Ces propos de l’héritier au trône n’ont fait qu’alimenter la polémique.
Ces révélations ne sont pas infondées. En effet, une source a affirmé au journal avoir entendu le prince de 73 ans exprimer à plusieurs reprises en privé, son opposition à cette politique et redouter que cela n’éclipse la réunion à venir du Commonwealth. A l’occasion de cette réunion qui aura lieu à partir du 20 juin au Rwanda, le Prince Charles représentera sa mère la reine Elizabeth II.
Chargé de la gestion de la communication du prince Charles, Clarence House a refusé de commenter ces propos. Cependant, il a souligné que l’héritier du trône « reste politiquement neutre », conformément aux exigences de son rôle au sein de la famille royale.
La position rwandaise
A Kigali, le prince Charles et Boris Johnson doivent rencontrer le président Paul Kagame. Il est à la tête du pays depuis la fin du génocide de 1994 qui a fait 800.000 morts, selon les chiffres de l’ONU.
Vendredi, 23 ONG ont appelé les dirigeants du Commonwealth à faire pression sur le Rwanda pour que ce pays libère des critiques du pouvoir et permette une plus grande liberté d’expression.
À noter que le Rwanda subit également en ce moment sur les réseaux sociaux, une campagne qui vise à informer les populations sur les atrocités que son gouvernement ferait subir à l’est de la RDC. Campagne jugée diffamatoire par ses patriotes, l’Etat n’a cependant pas encore fait de déclaration dessus.
Déjà en conflit avec la RDC, le Rwanda ne ferait-il pas mieux de d’abord gérer les questions politiques d’ordre continental avant d’essayer de redorer son image auprès des colons ?