Gabon : Les populations à bout de nerfs à cause du maraudage des éléphants

Gabon : Les populations à bout de nerfs à cause du maraudage des éléphants Actualité & Info | Éditions Afrique

Les éléphants de forêt en maraude au Gabon sont plus petits que leurs frères de la savane africaine, cependant, leurs raids destructeurs sur les champs des agriculteurs ont un impact considérable sur le soutien au gouvernement et à son programme de conservation.

Les 10 % du territoire protégé par des parcs nationaux ont fait du Gabon, le principal bastion d’Afrique centrale pour les éléphants de forêt. Cette espèce gravement menacée, dont la relative abondance et les habitudes de maraudage sapent les efforts déployés pour les protéger, alertent les autorités et les scientifiques.

Selon le ministère de l’environnement du Gabon, ce conflit ne date pas d’aujourd’hui, cependant il a pris de l’ampleur ces derniers années, particulièrement en 2021 où on a vu de manifestations de plus en plus considérables et nombreuses de la part de agriculteurs à travers le pays.

« Certaines personnes ne peuvent plus cultiver, les éléphants mangent une si grande partie de leurs cultures », a déclaré le ministre de l’Environnement, Lee White. « C’est devenu une question politique et cela érode le soutien à la conservation et au président (et) au gouvernement » ajouta-t-il.

La capitale Libreville est marquée par les actions des éléphants. Des troncs d’arbres éclatés, des broussailles piétinées et de la terre retournée. Lorsque les éléphants s’approchent des villages, ces bulldozers naturels peuvent anéantir les cultures soigneusement entretenues en quelques heures seulement, d’où la colère des agriculteurs.

« Vous pouvez voir comment les gens s’énervent et parfois tuent les éléphants », a déclaré le guide Djakel Matotsi en suivant les traces des éléphants dans le parc national de Pongara.

Selon le ministère de l’environnement, près de 50 éléphants sont tués par vengeance par an ou par autodéfense, tandis que près de 10 personnes ont été tuées par des éléphants au cours des 2 ans et demi.

Oliwina Boudes, responsable d’une association d’agricultrices affirme que les raids provoquent une hausse des prix des denrées alimentaires, provoquent l’exode rural et renforcent le sentiment que les autorités privilégient les intérêts des éléphants tout en ne faisant pas grand-chose pour aider le tiers des Gabonais qui vivent dans la pauvreté. « Toutes les communautés rurales nourrissent ce sentiment » ajouta-t-elle.

La nécessité d’une solution au problème des éléphants

Selon une étude publiée dans Global Ecology and Conservation en décembre, le Gabon abrite 95 000 éléphants, soit 60 à 70 % de tous les éléphants de forêt d’Afrique, qui sont confrontés à un déclin dramatique ailleurs. De ce fait, gérer ces troupeaux tout en promouvant le développement rural au Gabon est d’une « importance critique pour la persistance de l’espèce », selon cette étude.

Après des consultations nationales en 2021, les autorités déploient cette année de nouvelles initiatives pour tenter de trouver cet équilibre. Pour remédier au manque de données sur les perturbations causées par les éléphants, le ministère a lancé une base de données et une application pour suivre et vérifier les plaintes. Ainsi, pour la première fois, le gouvernement a prévu 4,5 millions de dollars dans le budget de cette année pour indemniser les agriculteurs pour les cultures saccagées.

Par ailleurs, le gouvernement autorise l’Organisation caritative Space for Giants (SfG) à tester des clôtures électriques repoussant les éléphants autour des champs, personnalisées pour simplifier leur installation et leur entretien dans les conditions de la forêt tropicale. Les 57 clôtures monobrin installées jusqu’à présent ont repoussé toutes les interactions avec les éléphants, a déclaré SfG en juin. Elle prévoit d’en installer 500 d’ici la fin de l’année si elle peut obtenir les fonds nécessaires.

John Poulsen, écologiste spécialiste des éléphants à l’Université de Duke, qui aide SfG à évaluer l’impact de l’essai de clôture, affirme que même avec les clôtures, le gouvernement devra faire davantage pour aider les agriculteurs à faire face aux éléphants dans le cadre de son plan de développement durable « Gabon vert ». Selon lui, le gouvernement pourrait éventuellement déployer des agents sur le terrain pour aider à éloigner les éléphants gênants des villages et dispenser des formations pour que les communautés puissent mieux gérer elles-mêmes les animaux à problèmes.

« S’ils ont cette perception que les éléphants sont si mauvais … cela affecte absolument leurs perspectives et leur volonté de travailler avec le gouvernement et avec d’autres efforts de conservation », a-t-il déclaré.

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