Gambie: Memory House, maison de recueillement pour les victimes de l’ère Jammeh

Gambie: Memory House, maison de recueillement pour les victimes de l'ère Jammeh Actualité & Info | Éditions Afrique

À quelques kilomètres du centre de la capitale, on trouve une maison bien différente des autres, la Memory House, la Maison de la mémoire. C’est un lieu loin d’être ordinaire, à plus d’un titre. C’est le premier et le seul endroit actuellement qui rend hommage aux victimes d’un régime qui a sévi pendant plus de 20 ans. Un hommage à ces torturés, ces morts et ces disparus que l’on appelle en Gambie « les victimes de Yahya Jammeh ».

Des objets ordinaires tels qu’un certificat de baptême, une casquette de baseball, des portefeuilles, des ceintures, des cravates et des cartes bancaires. Accompagnés des feuillets de papier qui comporte des mots soigneusement bien écrits, révèle une histoire qui semblait être oubliée par plusieurs gambiens.

Sirra Ndow, représentante de la Gambie pour le Réseau africain contre les exécutions extrajudiciaires et les disparitions forcées (ANEKED), qui gère la Memory House a déclaré que « Notre cible est constituée des personnes qui ont entendu des choses [sur l’ère Jammeh] mais qui ne savent pas vraiment s’il faut les croire ou non ».

Arrivé au pouvoir lors d’un coup d’État militaire en 1994, Jammeh a dirigé la Gambie pendant 20 bonnes années. Durant ces années, des centaines de Gambiens, des journalistes, des migrants, des militants politiques, ainsi que des étudiants manifestants et des Gambiens pris au hasard au mauvais endroit au mauvais moment, ont été tués ou ont disparu.

Les patients atteints du VIH étaient contraints de suivre des traitements bidons et dangereux et d’autres gambiens étaient ciblés dans des « chasses aux sorcières », accusés de sorcellerie.

Jusqu’en 2016, Jammeh a pu rester au pouvoir grâce au élections truquées et parfois à la suppression de celle-ci. Il a finalement pris la poudre d’escampette et s’est réfugié en Guinée équatoriale, où il vit aujourd’hui en exil.

Ndow a déclaré à Al Jazeera que « Le fait que les gens sachent ce qui s’est passé est un acte de responsabilité. Les gens qui oublient laissent l’impunité derrière eux… Pour la plupart des gens, ils entendent seulement les histoires, mais ils ne les ressentent pas. La Maison de la Mémoire apporte cet élément de ressenti. ».

Le président de l’Association du barreau gambien, qui a produit des documents d’orientation sur les options permettant de mettre en œuvre les recommandations de la TRRC (Commission Vérité, Réconciliation et Réparations) Salieu Taal a déclaré par courriel que La mémorialisation « contribue à éduquer le public en conservant une trace permanente de l’histoire, de la perspective et du contexte d’une période de violations flagrantes des droits de l’homme. C’est important car cela permet aux victimes en particulier de contrôler le récit ». Ainsi, la Memory House « jouera un rôle important dans l’éducation des générations de Gambiens sur un chapitre sombre de notre histoire dont nous devons collectivement nous assurer qu’il ne se reproduira plus jamais. Il est important que les leçons du processus (de justice transitionnelle post-Jammeh) soient intégrées dans notre système éducatif afin d’inculquer une culture contre l’impunité. ».

La TRRC ne pouvait pas couvrir toutes les victimes du régime de Jammeh, donc la Memory House a formé trois femmes gambiennes pour documenter davantage de crimes. Leur travail est présenté dans une exposition qui a ouvert ses portes au début du mois, intitulée We. Are. Not. Done. Des portraits et des témoignages « les victimes de Yahya Jammeh » de parsèment la cour du musée.

Le travail fait par la Memory House retrace l’histoire des ces victimes-là qui n’ont pas eu l’occasion de réclamer justice. C’est également un processus de guérison pour les membres des familles des victimes qui portent jusqu’à présent l’opprobre de cette histoire.

La Commission Vérité, Réconciliation et Réparations (TRRC) de Gambie qui comte prêt de 250 victimes de l’État ou de ses agents a publié son rapport final en décembre, qui appelle à tout, de la réforme constitutionnelle à la poursuite de Jammeh.

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