Mali : L’après Keïta et les 24 premiers mois de Transition, que s’est-il passé au Mali ?

Mali : L’après Keïta et les 24 premiers mois de Transition, que s'est-il passé au Mali ? Actualité & Info | Éditions Afrique

Le 18 août 2020 était un tournant pour le peuple malien. Complètement insensible aux appels et revendications de son peuple, Ibrahim Boubacar Keïta et son régime ont été victimes d’un soulèvement populaire, qui a donné naissance à un renversement historique. C’est la révolte dans les rues de Bamako où les populations crient et manifestent leur ras-le-bol. Deux ans plus tard, retour sur la révolte qui a mené Assimi Goïta à la tête du pays.

À la tête du mouvement de révolte, se trouve le Colonel Assimi Goïta et son groupe de jeunes officiers. Ensemble, ils constituent le Comité National pour le Salut du Peuple (CNSP) et affirment avoir parachevé une révolution des masses.

Le mouvement de la renaissance

Lorsque Goïta et ses hommes prennent d’assaut le palais, le M5-RFP, l’association de politiques, les religieux et la société civile, ont déjà préparé le terrain pour eux. En d’autres termes, il s’agissait d’un renversement unanime de la part des Maliens.

À la télévision nationale, Goïta accompagné d’autres officiers et hommes de rangs, sont dévisagés par les journalistes d’ici et d’ailleurs, les caméras et les flashs qui crépitent, tous les yeux sont rivés sur eux, et les oreilles pendules aux lèvres du nouvel homme fort du Mali.

Après de fortes pressions de la Communauté internationale, plus particulièrement de la CEDEAO, en faveur du retour d’un civil à la tête du pays, Goïta devient vice-président de la Transition, en charge des questions de Défense et de sécurité, à la suite de l’élaboration d’une Charte de Transition. 

Le jeune officier issu des Forces Spéciales Maliennes a en tête un projet de renaissance qui va réanimer un pays abandonné, laissé pour mort par le régime à peine déchu. Goïta promet de mettre un terme à la souffrance des siens et de trouver des solutions aux maux qui ont miné la société malienne et son peuple déjà affaibli par les groupes rebelles et les terroristes, mais aussi par la gabegie financière, l’insécurité et la mauvaise gouvernance.

Le gouvernement de la transition

Le gouvernement de la transition ne va pas tarder à prendre place. Bah N’daw, un ancien officier à la retraite, est choisi par la CEDEAO et la classe politique malienne pour être le président de la Transition. Cet ancien ministre de la Défense est réputé pour être un homme « intègre et patriote ». Le 20 septembre 2020, il prête officiellement serment et devra diriger le pays pendant 18 mois, tel que convenu par ceux qui l’ont choisi.

N’daw forme rapidement son gouvernement. Le poste de premier ministre est attribué à Moctar Ouane, nommé le 27 septembre suivant et choisi pour ses aptitudes à assurer sa mission. Il a sous son autorité, une équipe composée de 25 ministres, avec des départements de souveraineté réservé à certains colonels du CNSP selon les dispositions de la Charte. Ainsi, le ministère de la défense est attribué au colonel Sadio Camara.

Protestations des Maliens

Malgré ce nouveau gouvernement mis en place pour assurer la transition, le Mali est toujours plongé dans une situation politique délicate et incertaine.

Menés par le Dr Choguel Kokalla Maïga, tous ceux qui ont usé de leur force pour renverser Keïta commencent alors à manifester et accuser les autorités militaires de confisquer le pouvoir. Le M5-RFP s’estime abandonné par les mêmes militaires qui avaient pourtant affirmé solennellement être venus parachever la lutte héroïque du peuple Malien pour le changement.

Ils prennent d’assaut le boulevard de l’indépendance pour se faire entendre. Ils manifestent non seulement contre le pouvoir de la transition mais également contre la multiplication des attaques terroristes, dans le Nord et le Centre du pays. Les protestations visent aussi l’ingérence continue de la France dans les affaires intérieures du Mali, les arrestations jugées extrajudiciaires et le coût de la vie devenu insupportable pour les Maliens depuis la pandémie de la Covid- 19.

Démission de N’daw

Le 07 juin 2021, le colonel Assimi Goïta prête serment devant la Cour Suprême et devient le chef de l’Etat du Mali, suivant les événements du 24 mai 2021 et la « rectification » de la trajectoire de la Transition qu’ils ont occasionnée.

La prestation de serment a lieu après que Goïta a mis Bah N’Daw et son Premier ministre Moctar Ouane « hors de leurs prérogatives » quelques heures seulement après l’annonce du gouvernement Moctar Ouane Il dans lequel des ténors de l’ex-CNSP ne figuraient plus. 

N’daw et Ouane seront ensuite seront ensuite conduits à la caserne militaire de Kati où ils verront la fin de leur parcours politique. Accusé d’avoir divulgué des secrets défense à la France, N’daw va annoncer sa démission. Une situation qui a laissé tout le monde sans voix, y compris le médiateur de la CEDEAO au Mali, l’ancien président nigérian, Goodluck Jonathan, dont la visite à Bamako quelques jours plus tard n’aura servi à rien.

Le régime Goïta

La rectification de la transition est le nouveau sujet d’informations à l’international. Les autorités françaises la qualifient d’un second coup d’état en un an et les médias français s’en donnent à cœur joie pour tirer sur le Mali de toutes parts.

Des faits qui vont ternir plus que jamais les relations entre Bamako et Paris et qui donneront lieu à une escalade verbale entre les deux camps. Cette fois, il n’y a plus de « seconde chance », le nouveau chef ne compte pas se laisser faire. D’ailleurs, le 31 janvier 2022, l’ambassadeur de France au Mali est expulsé du pays. RFI et France24 ne tardent pas à connaître le même sort. Les couleurs sont annoncées, Bamako n’attend plus, Bamako agit.

Peu après, les nouvelles autorités en place expriment leur souhait de diversifier leurs partenaires et déclarent leurs intentions de renforcer les relations de coopération entre le Mali et son « viel ami », la Russie. À la suite de ces vives réactions du régime Goïta, Macron décide de façon unilatérale, de mettre fin à la Force Barkhane et de la redéployer hors du pays.

Nouvelle période de transition au Mali et sanctions de la CEDEAO

Le Mali prend la décision de dénoncer le traité de coopération militaire qui le liait à la France et informe la communauté sous-régionale de l’impossibilité de respecter les 18 mois de transition convenus au départ.

Lors des Assises Nationales de la Refondation (ANR) tenues du 27 au 31 décembre 2021, la nouvelle durée de la Transition est fixée dans un intervalle allant de 6 mois à 5 ans. Cette nouvelle ne sera pas du tout appréciée par la CEDEAO qui ira même jusqu’à la qualifier de « provocation ». Par la suite, l’organisation sous-régionale va commettre une erreur monumentale en pensant coincer le Mali. À l’issue de son 61e sommet tenu le 9 janvier 2022 à Accra au Ghana, elle va imposer au pays de lourdes sanctions économiques et financières.

Des attaques considérées illégales et disproportionnées, auxquelles le Mali va cependant résister contre toute attente, jusqu’à la leur levée le 3 juillet dernier. Le régime Goïta n’est pas resté là à se tourner les pouces. Durant ces six longs mois de difficultés, les autorités de la Transition ont pris des mesures afin de renforcer le partenariat avec les voisins de Guinée et de la Mauritanie.

Au bout d’un long moment d’hésitation, les sanctions sont levées ; les frontières sont ouvertes sans que les nouvelles autorités ne perdent de vue leur détermination à rendre au Mali sa dignité.

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