Nigéria : Menace croissante des djihadistes après l’attaque de Kuje

Nigéria : Menace croissante des djihadistes après l'attaque de Kuje Actualité & Info | Éditions Afrique

Selon les analystes, l’attaque sur la prison de Kuje par une centaine d’hommes armés le soir du 5 juillet, et revendiquée par le groupe État Islamique, représente l’état de constance et de croissance de la menace djihadiste dans le pays le plus peuplé du continent.

Ils étaient munis d’explosifs lorsque les hommes armés ont pris d’assaut la prison de Kuje, dans la banlieue d’Abuja, avec pour objectif de libérer des centaines de détenus dont environ 70 djihadistes.

Alors que la plupart de ces évadés ont été recapturés peu de temps après l’attaque, la police reste à la recherche de nombreux autres. Elle a diffusé des photos des djihadistes qui se sont enfuis au moment des faits. Selon un haut responsable du contre-terrorisme nigérian, l’attaque de la prison de Kuje représente un « embarras national » avec des implications majeures en matière de sécurité puisque certains de ces évadés sont des poseurs de bombes et des militants de haut rang. « L’attaque va naturellement les enhardir. C’est un énorme coup de pouce psychologique pour eux », a-t-il insisté.

La hardiesse des djihadistes

D’après les analystes, le fait que l’attaque n’ait pas été perpétrée dans une ville isolée du nord-est du Nigeria, qui est le fief des terroristes, mais bel et bien dans une zone à seulement 20 km de l’aéroport international d’Abuja et à 40 km de la villa présidentielle, montre que c’est un signe de la capacité croissante des djihadistes à étendre leurs menaces sur d’autres régions.

Le cabinet de conseil nigérian SBM Intelligence insiste sur le fait que :« l’attaque de Kuje, revendiquée par l’Iswap (État islamique en Afrique de l’Ouest), représente un échec monumental dans la collecte de renseignements ». D’après la source, le message qu’envoie l’Iswap est clair : « ils sont capables de frapper Abuja quand bon leur semble ».

Kuje, un ajout à un bilan déjà mauvais à l’aube des prochaines élections

Alors qu’il termine son 2e mandat présidentiel, Muhammadu Buhari est très critiqué à cause de l’instabilité et de l’insécurité quasi-généralisées dans son pays. L’actuel président nigérian qui ne se représentera pas à l’élection de février 2023 a effectué une brève visite à la prison de Kuje la semaine dernière, durant laquelle il a demandé comment une telle attaque avait pu se produire.

Ces prochaines élections seront fortement marquées par le sujet de la sécurité, qui sera un véritable enjeu crucial pour les candidats et le peuple nigérian, constamment sous la menace.

Pour rappel, le jour de l’attaque à Kuje, des riverains ont rapporté avoir entendu après 22h de fortes explosions et des coups de feu. Selon les autorités pénitentiaires, les tirs des assaillants sur les gardes servaient de diversion pendant que d’autres libéraient les détenus et brûlaient des véhicules devant la prison. « L’attaque de ce centre correctionnel est symptomatique de l’échec de la sécurité », a déclaré le président du Sénat, Ahmad Lawan.

Cycle infernal de violences

De manière générale, le Nigéria est en proie constante à des attaques de terroristes. Même si la plupart de ces drames ont lieu dans le nord-est du pays. À Abuja, la dernière attaque majeure remonte à juin 2014. Il s’agissait d’une attaque à la bombe dans un centre commercial qui a fait 21 morts. Deux mois plus tôt, cette fois dans une gare routière, 80 personnes ont perdu la vie après une autre attaque à la bombe.

En 2015, alors que d’un côté Muhammadu Buhari était élu président, de l’autre, le groupe djihadiste Boko Haram contrôlait de vastes pans de l’État du Borno (nord-est). Fort heureusement à ce moment, les troupes nigérianes et tchadiennes ont réussi à repousser Boko Haram jusque dans les forêts.

Au même moment, l’Iswap avait fait sécession de Boko Haram et les deux factions se sont livrées à des guerres intestines qui ont abouti l’année dernière, à la mort du chef de Boko Haram, Abubakar Shekau. Depuis cet incident, les analystes et autres sources sécuritaires ont affirmé que la menace djihadiste a évolué.

Entre terroristes et bandits

Dans une note, le chercheur à l’institut d’études de sécurité (ISS) Malik Samuel est revenu sur les activités de l’Iswap, le groupe djihadiste dominant dans le nord-est du Nigeria depuis la mort de Shekau. Il a souligné que pour la première fois depuis sa formation en 2016, le groupe a mené en 2022 des attaques dans les États de Taraba (est), de Kogi et du Niger (centre), ainsi qu’à Abuja.

En dehors d’eux, les populations doivent faire face à d’autres bandes criminelles lourdement armées surnommées les« bandits », qui attaquent fréquemment les villages, kidnappent et tuent de nombreux habitants dans le nord-ouest et le centre du pays.

Évoquant la situation d’insécurité dans le pays, Don Okereke, un Analyste et ancien militaire basé à Lagos rappelle que :« Abuja est encerclée par des États comme ceux du Niger et de Kogi où il y a eu des évasions et des attaques terroristes ».

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