Sénégal : Honneur aux femmes parlementaires

Sénégal : Honneur aux femmes parlementaires Actualité & Info | Éditions Afrique

Le patriarcat a sans doute encore de beaux jours devant lui mais, le Sénégal n’entend pas lui faciliter la tâche. En effet, le pays va connaître ce lundi, un fait historique avec plus de 44% des sièges de la prochaine Assemblée Nationale occupés par des femmes parlementaires. Ce chiffre représente également la plus grande proportion jamais atteinte dans la sous-région.

Après les élections de juillet prochain sur toute l’étendue du pays, 73 sièges sur les 165 du parlement, seront occupés par des femmes. Une première qui classe le Sénégal au 4e rang en Afrique en matière de parité parlementaire.

Un Sénégal qui se démarque

Plongé dans une sous-région en proie à des conflits et des crises, le Sénégal apparaît coe un phare de démocratie et de stabilité. Grâce à ce grand pas vers la parité parlementaire, il se classe 18e mondial devant des pays tels que la Suisse, la France, la Grande-Bretagne ou encore les États-Unis.

Si le Sénégal est à féliciter, c’est parce qu’il s’inscrit dans cette liste de pays qui tient à donner aux femmes les mêmes droits qu’aux hommes. En 2010, le pays a voté une loi qui exigeait la « parité absolue entre les sexes » dans toutes les institutions électives et l’alternance entre les hommes et les femmes dans les listes qui ont longtemps été dominées par les hommes.

L’ancienne premier ministre Aminata Touré explique que cette loi donne aux femmes le droit de s’exprimer sur les questions de budget national et de parler des préoccupations besoins des femmes au Parlement. Elles peuvent également montrer à la société que les femmes sont tout aussi qualifiées que les hommes et qu’elles peuvent apporter une autre culture de gouvernance.

D’après un rapport de l’ONU, hors mis au Sénégal, seuls 15 des 111 postes parlementaires ou ministériels élus ou nommés entre décembre et juin en Afrique de l’Ouest et au Sahel, ont été occupés par des femmes.

Des bâtons dans les roues

Malgré cette entrée en fonction des femmes parlementaires, il faut être prudent avant de vite crier victoire. En particulier sur des questions relatives aux droits reproductif et à la violence domestique. Des faits dont l’avancée doit se faire en fonction des réalités politiques du pays mais pas que.

Ainsi, Aminata Touré, la future députée du parti APR du Président Macky Sall, a prévenu qu’en politique, les pionnières se heurtent toujours à la résistance et à la suspicion. Elles doivent faire face à des personnes prêtes à tout pour leur mettre des bâtons dans les roues. Des personnes qui vont scruter leurs moindres faits et gestes à la recherche du petit défaut sur lequel elles s’accrocheront pour leur en tenir rigueur.

D’ailleurs, ces nouvelles occupantes des sièges parlementaires ont du pain sur la planche afin d’arriver à une véritable parité des sexes dans le quotidien de la société sénégalaise. Selon l’indice d’égalité des sexes de l’ONU, le pays est 130e sur 189 états.

Mame Diarra Fam, une nouvelle députée de l’opposition au Parti démocratique sénégalais a reconnu qu’il y avait tellement de choses à faire en vue d’opérer un changement réel. Elle a insisté sur les cas de violence faites sur les femmes, de l’éducation des filles et l’accès à la santé, après une série de tragédies qui ont fait la une des journaux dans les maternités au cours des 18 derniers mois.

Des efforts progressifs

L’avancée se fera certes, mais elle se fera de manière progressive. Jusqu’en 2020, tout acte de viol n’était pas criminalisé et à ce jour, le pays n’a pas encore pleinement adopté les lois nationales du protocole Maputo.

Il s’agit d’une initiative de l’UA qui visait à élargir l’accès à l’avortement et qui oblige les États membres à autoriser l’avortement dans les cas de viol, d’inceste, entre autres. Le Sénégal a ratifié cette initiative en 2005, mais force est de constater que rien n’est suivi de ce côté.

Selon l’ONG Africa Check, un quart de la population carcérale féminine avait été emprisonnée pour des crimes liés à l’avortement en 2020. Aissatou Ywa a déclaré que dans le pays, l’avortement n’est autorisé que pour sauver la vie d’une femme enceinte. Elle travaille pour Task Force, une alliance d’associations de la société civile et de médecins qui font campagne pour que le viol et l’inceste soient inclus dans les raisons permettant aux femmes d’avoir recours à un avortement.

D’autres groupes et associations de campagne agissent sans relâche afin de changer l’âge légal du mariage pour les filles. Alors que chez les hommes, il est de 18 ans, chez les fille, il est toujours de 16 ans. Ces groupes font pression pour qu’il passe à 18 ans. Ce qui leur permettrait de poursuivre leur scolarité et d’être sur un pied d’égalité avec les garçons, en terme de droits. Ces groupes travaillent aussi afin que les mères aient la même autorité parentale que les pères aux yeux de la loi.

Le prochain test de Sall

Même s’il y a encore beaucoup à faire, il faut également reconnaître que quelques progrès ont déjà eu lieu.

Aminata Touré alors ministre de la Justice, avait présenté un projet de loi qui permettrait aux femmes sénégalaises mariées à des étrangers de transmettre leur nationalité à leurs enfants. Ce droit qui était déjà autorisé pour les hommes sénégalais, a été adopté en 2013 pour les femmes. Une autre loi largement poussée par les femmes parlementaires, avait permis de criminaliser le viol.

Mais pour savoir si le nombre croissant de femmes au parlement est synonyme de pouvoir exécutif, il faudra attendre que Sall passe le test du premier ministre et de voir combien de femmes seront nommées ministres. Pour M. Touré, il faut que la parité soit étendue au cabinet et même au secteur privé.

Quant aux Lesgroupes de la société civile, ils mènent une campagne acharnée en faveur d’une femme présidente de l’assemblée, un rôle qui n’a jamais été occupé par une femme et qui sera un très grand pas vers leurs objectifs et un espoir que les choses changent.

Pour rappel, de 2001 à 2002, Mame Madior Boye était la première femme Premier ministre du Sénégal. Elle a été suivie par Aminta Touré, en poste de 2013 à 2014. Mais en 2019, Sall a supprimé ce poste en raison du système présidentiel du pays.

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