L’urbanisation a laissé l’avenir de la population de Bamako à merci de la sélection naturelle. Si les plus nanties réussissent à s’en sortir, les familles modestes ont du mal à tirer leur épingle du jeu. La crise en Ukraine et l’embargo imposé par la CEDEAO, plonge le pays en général et la capitale en particulier dans un contexte de forte inflation. Le prix des denrées tels que les légumes, fruits et céréales avait déjà grimpé du fait de la destruction des zones agricoles périurbaines. Le pays cherche encore un équilibre entre l’urbanisation et la préservation du bien-être de toutes les couches de la société.
La situation du pays est en dégradation continue depuis plusieurs décennies. Les chocs externes tels que les restrictions des organismes sous régionaux ou encore la crise entre la Russie et l’Ukraine n’ont fait que resserrer l’étau autour du cou des Maliens.
Une flambée de prix vertigineuse à Bamako
Consommer décemment dans le pays est devenu un luxe quand on observe comment les prix évoluent. A titre illustratif, un œuf frais coûte 150 FCFA, un morceau de savon 250 FCFA, un kilo de maïs 450 FCFA. Le prix du carburant a également connu une hausse qui impacte sur le niveau de vie des bamakois. Le super est passé de 762 à 811 F CFA et le gasoil de 760 à 809 F CFA. La bouteille de 6 kg est désormais vendue à 6 360 FCFA, celle de 12 kg à 12 500 FCFA et la bouteille de 35 kg à 34 500 FCFA.
Cette situation est tributaire de plusieurs facteurs endogènes qui gangrènent l’économie depuis longtemps. Il s’agit tout d’abord de l’urbanisation. Ce phénomène a entrainé la destruction des espaces cultivable dans la ville de Bamako, forçant les commerçants locaux à s’approvisionner auprès des agriculteurs ruraux via des intermédiaires cupides. Les marchandises une fois en ville, supportent les charges d’intermédiation, de transport, de manutention et fiscales.
Bamako : l’urbanisation, base de la pyramide de tous les maux.
Les avis récoltés par une dépêche locale nous permettent de lire ce qui suit :
« Combien de plantations de citrons, de mangues… avions nous autour de Bamako, il y a seulement 10 ans. Aujourd’hui ces vergers et champs ont laissé la place aux immeubles. C’est donc naturel que les prix augmentent parce que l’offre est limitée. Déjà la mangue se vend à l’unité à plus de 150 F. Qui l’aurait cru ?», rappelait fort pertinemment sur les réseaux sociaux M. Sidy Kéita, directeur général de « Mali Tourisme ».
« Maintenant, il n’y a presque plus de potagers dans l’ACI 2000. Le béton a tout pris. Nos marchés sont approvisionnés via les villages périphériques et l’intérieur du pays. Le coût du transport et la cupidité des intermédiaires aidant, les prix des condiments ne peuvent pas être abordables. Tout comme ceux des céréales », a-t-elle poursuivi. « Le maïs et l’arachide frais sont en train de devenir un luxe pour les Bamakois. Tout comme les fruits. Même la simple menthe que nous mettons dans notre thé est cédée en petite quantité à un prix inimaginable il y a quelques années », déplore Adama Sidibé, un enseignant à la retraite.
« Les produits coûtent non seulement chers, mais ils sont sans saveur et ne se conservent pas longtemps parce qu’ils sont cueillis avant la maturation et n’arrivent plus sur les étals frais. Sans compter les effets de l’usage abusif des intrants », conclut Djénéba Doumbia.
Le peu d’espace urbain exploitable pour l’agriculture est sujet aux inondations et d’autres phénomènes environnementaux. Les litiges fonciers autour de ces espaces et l’absence de règlementation sont autant d’éléments perturbateurs ne permettant à la capitale de produire localement ses cultures maraichères
Les chocs externes n’arrangent rien à une situation préalablement précaire.
La hausse des cours mondiaux du cours des matières a entrainé la hausse du prix du carburant. Mieux encore, l’État a décidé retirer ses subventions de gaz domestique, laissant la population ressentir le poids de la vie et de la situation économique actuelle.
L’instabilité politique dans le pays n’arrange en rien la situation. Plusieurs actions d’institutions internationales peinent à être mise en place du fait de l’actuel gouvernement et des soupçonnés relations avec l’armée russe. Plusieurs avantages dans le cadre de la coopération régionale sont gelés, tout comme les fonds du pays auprès de la banque centrale.
Les chocs externes ne viennent qu’accentuer cette situation déjà insupportable pour le pays. Qu’il s’agisse de la guerre en Ukraine, des restrictions sous régionales, tout ce que la population retient est que tout va mal.
Le pouvoir de transition et les différents ministères se doivent de préparer un cadre propice au développement du Mali. Sachant que le nœud du problème avec la CEDEAO est la durée de la transition de la junte au pouvoir, il faudrait voir dans quelle mesure diluer les choses car finalement, c’est le malien, l’unité de mesure du pays qui en paie les frais.