Sadok Belaïd, juriste chargé de rédiger la nouvelle constitution tunisienne, s’est donné pour mission de supprimer toutes les références à l’Islam dans la constitution. Un projet qui risque de faire grincer des dents dans ce pays musulman.
C’est un débat houleux qui vient d’être lancé en Tunisie. En effet le pays a une forte tradition musulmane et plusieurs partis d’inspiration islamiste ont joué un rôle de primordial depuis la révolte de 2011 qui fit tomber le régime ben Ali, les déclarations de Sadok Belaïd risquent donc de provoquer un véritable tollé.
Le premier article de la Constitution actuelle adoptée en grande pompe en 2014, trois ans après la chute de la dictature de Zine El Abidine ben Ali, stipule, tout comme la Charte de 1959, que la Tunisie « est un Etat libre, indépendant et souverain, l’Islam est sa religion, l’arabe sa langue et la République son régime ».
Une mesure contre l’extrémisme ?
Le but d’après Belaïd est de présenter un projet de charte expurgée de toute référence à l’islam pour combattre les partis d’inspiration islamiste comme Ennahdha. « 80 % des Tunisiens sont contre l’extrémisme et contre l’utilisation de la religion à des fins politiques. C’est précisément ce que nous allons faire tout simplement gommant l’article 1 dans sa formule actuelle », a déclaré Sadok Belaïd dans un entretien à l’AFP.
Nommé le 20 mai à la tête de la « Commission nationale consultative pour une nouvelle République« , chargée de rédiger un nouveau projet de Constitution, M. Belaïd a indiqué qu’il soumettrait le projet pour validation au président Kais Saied au plus tard le 15 juin avant qu’il ne soit soumis à référendum, une consultation annoncée pour le 20 juillet.
« Si vous utilisez la religion pour faire de l’extrémisme politique, eh bien nous l’interdirons« , a poursuivi cet universitaire de 83 ans qui affirme avoir « une très grande et une très profonde amitié et proximité » avec M. Saied qu’il avait eu comme étudiant.
Selon lui, « Ennahdha et d’autres partis sont les suppôts de plusieurs forces ou puissances ou Etats ou mini-Etats étrangers qui ont beaucoup d’argent qu’ils veulent dépenser comme ils veulent et qu’ils utilisent pour intervenir dans les affaires du pays« . « Ça c’est de la trahison » ajoute-t-il.
Néanmoins, le nouveau régime doit être conçu de façon que le président ne soit pas « entraîné ou attiré par les tentations de dictature, de tyrannie ou d’abus de pouvoir ».